Il me semble de plus en plus que le philosophe, qui est nécessairement un homme du lendemain et du surlendemain, s’est de tout temps trouvé et devait se trouver en contradiction avec le présent : son ennemi a toujours été l’idéal du jour. Jusqu’ici, tous ces extraordinaires pionniers de l’humanité qu’on appelle philosophes, et qui eux-mêmes ont rarement eu le sentiment d’être des ennemis de la sagesse, mais plutôt de désagréables fous et de dangereuses énigmes, se sont assigné pour tâche une tâche dure, involontaire, inéluctable, mais grandiose : être la mauvaise conscience de leur époque.
Friedrich Nietzsche (Par-delà le bien et le mal, § 212)